Gwangju, la ville de lumière et de courage
Gwangju est une grande ville, vibrante et généreuse, où passé et présent se croisent à chaque coin de rue.
Sous son apparente modernité, elle porte une mémoire indélébile : celle de deux soulèvements qui ont marqué à jamais l’histoire coréenne.
Dans les années 1920, Gwangju s’est levée contre la domination japonaise.
Et en mai 1980, son peuple s’est de nouveau dressé — cette fois pour la liberté et la démocratie.
Ces événements, gravés dans les pierres et les cœurs, ont fait de Gwangju le symbole du courage collectif et de la dignité retrouvée.
Aujourd’hui, la ville s’est réinventée sans jamais oublier.
Ses musées, ses fresques murales et ses parcs commémoratifs racontent l’histoire avec pudeur et fierté.
Mais Gwangju, c’est aussi la chaleur humaine, les marchés colorés, les cafés animés et la créativité artistique qui pulse à chaque rue.
Ville de lumière, comme son nom l’indique, Gwangju éclaire encore la conscience de la Corée contemporaine.
Marcher dans ses rues, c’est sentir la force tranquille d’un peuple qui a su transformer la douleur en espérance, et la mémoire en avenir.


























Mémorial du 18 mai
1980 - Rappel des faits :
Il y a 45 ans presque jour pour jour, tout comme ce 4 décembre, la martiale est décrétée.
En octobre, le président Park Chung-hee est assassiné. Cela crée un vide politique, qui, malgré la mise en place d’un gouvernement provisoire, profitera au Général Chun Doo-hwan. En effet, celui-ci organisera un coup d'État militaire le 12 décembre 1979 et prendra le contrôle du pays, en écartant ses rivaux.
Mars-avril 1980, la population s’insurge pour appeler à la fin de la loi martiale, à des élections libres et à plus de liberté démocratique.
Le mouvement est suivi dans tout le pays mais est plus intense à Séoul et Gwangju. Cependant, les manifestations provoquent une dureté et une extension de la loi martiale à tout le pays entraînant ainsi la fermeture du Parlement, l’interdiction des activités politiques, la censure des médias, la suspension des cours dans les universités, et enfin l’arrestation de nombreux leaders étudiants, de syndicalistes et d’opposants.
Nous sommes le 17 mai 1980.
Le lendemain, 18 mai, les étudiants se soulèvent et l’armée est envoyée pour réprimer la révolte. La colère atteint la population qui rejoint les étudiants créant ainsi une insurrection citoyenne.
Le mouvement dure 10 jours, soit jusqu’au 27 mai. On dénombre des centaines de victimes.
Chunyeommun ou Cimetière national de Gwangju - lieu emprunt d'émotion et de quiétude d'une dignité rendue
Les corps sont ramassés dans des chariots et des camions de nettoyage et sont ensevelis pour certains anonymement au cimetière de Mangwol-dong. Pour ceux dont les corps sont récupérés avant l'armée, des cérémonies funéraires collectives étaient organisées afin de rendre un dernier hommage et permettre aux familles d'entamer leur deuil.
Dans les années 90, une commission enquêtera sur cette tragédie et ce qui donnera lieu à la création d’un cimetière pour honorer le combat des victimes pour la démocratie. C’est le Chunyeommun. Les défunts précédemment entérrés à Mangwol-dong seront transférés vers Chunyeom
Il y a actuellement 746 sépultures, où reposent désormais les victimes tuées lors des manifestations en mai 1980 mais également, les blessés décédés ultérieurement mais qui ont pris part, ou non, aux événements.
Pour accéder au cimetière, il faut franchir la Porte de la Démocratie, puis traverser la vaste Place de la Démocratie avant d’arriver à la Porte du Souvenir (Chunyeommun). Plus loin, se dresse la Tour de la Commémoration, haute de quatre mètres, dont les deux mains jointes symbolisent la résurrection et une nouvelle vie. Au pied de cette tour, un autel et des brûle-encens permettent de rendre hommage aux morts.
En avançant, vous découvrez sur les côtés de grands reliefs représentant des scènes du soulèvement. Plus à droite, un monument en forme de dolmen, rappel des tombes traditionnelles, abrite les portraits et les tablettes mortuaires des victimes, dont certaines des enfants et nourissons. Face à lui, la Porte de l’Histoire expose des images et des documents retraçant ces journées de mai.
Sur les côtés, des reliefs gravés racontent la colère et l’espérance de mai 1980. Chaque détail, chaque symbole, guide le visiteur dans un dialogue silencieux entre douleur et espoir.
"La marche pour les bien aimés" Il s'agit d'une chanson de protestation sud-coréenne, intitulée « March for the Beloved », composée en 1981 en hommage à Yoon Sang‑won, militant pro‑démocratie, et Park Ki‑soon, militant syndicaliste, tous deux morts lors du soulèvement de Gwangju en 1980. Ecoutez-là, vous ne resterez pas insensible à la puissance des mots et des voix.
Sans laisser ni amour, ni honneur, ni nom,
Nous avons juré de lutter toute notre vie.
Les camarades sont partis, seul flotte le drapeau.
Jusqu’au jour nouveau, ne vacillons pas.
Le temps passe, mais la terre et les montagnes se souviennent,
Des cris ardents qui se sont levés en éveil.
Nous marchons en tête, suivez-nous, vivants !
Nous marchons en tête, suivez-nous, vivants !












































Les photos représent les reliques conservées aux archives du "May 18 Democratic Uprising Archives. Des carnets de notes d'étudiants - une reconstitution de scène avec les chaussures éparpillées après les assauts de l'armée - les montres retrouvés sur les corps - les bâches dans lesquelles étaient enveloppés les cadavres - une reconstitution des fosses communes - une gamelle telle que celles utilisées par les femmes et mères des manifestants pour préparer les repas pendant le soulèvement - la "Place Démocratique du 18 mai" - un bâtiment portant encore les impacts de balles. Je vous invite à lire "Celui qui revient" de Han Kang, Prix Nobel de Littérature 2024; vous y reconnaîtrez plusieurs des photos ci-dessus.
Mémorial du Mouvement des Étudiants de 1929
1929 Rappel des faits :
Il y a près d’un siècle, le 3 novembre 1929, éclate à Gwangju un mouvement étudiant d’une ampleur inédite sous l’occupation japonaise.
L’événement déclencheur semble anodin : une altercation entre élèves coréens et japonais à la gare de Naju. Mais très vite, la tension monte et les étudiants de Gwangju s’organisent pour manifester contre les discriminations, l’oppression coloniale et pour réclamer la dignité nationale.
À partir du 3 novembre, des milliers d’élèves défilent dans les rues, bientôt rejoints par d’autres écoles, d’autres villes, et même par la population. Le mouvement s’étend rapidement à tout le pays et mobilise plus de 50 000 participants. Face à cette vague de contestation, la répression japonaise est brutale : arrestations massives, emprisonnements, expulsions scolaires. Plus de 500 étudiants sont arrêtés, plusieurs dizaines blessés, mais le mouvement laissera une trace profonde dans la conscience nationale.
Cet épisode est considéré comme la deuxième grande mobilisation nationale après le Mouvement du 1er mars 1919, et l’une des pierres angulaires de la lutte pour l’indépendance de la Corée.
Lieux de mémoire :
Aujourd’hui, à Gwangju, le Mémorial du Mouvement des Étudiants de 1929 perpétue ce souvenir. Situé à proximité de l’ancienne école où s’organisa la contestation, il retrace le courage des jeunes qui osèrent défier l’Empire colonial.
Le bâtiment, sobre et massif, s’ouvre sur une vaste place où flotte le drapeau coréen. À l’intérieur, des galeries présentent des documents originaux, des journaux clandestins, des objets personnels et des photographies des élèves arrêtés. Une grande fresque murale illustre les cortèges d’écoliers, drapeaux en main, défiant la répression japonaise.
À l’extérieur, un monument commémoratif en pierre blanche se dresse, gravé des noms des participants. Sur le parvis, une sculpture de jeunes étudiants en marche incarne leur détermination, leurs visages tournés vers l’avenir. Non loin, une stèle rappelle les lieux clés de la mobilisation de novembre 1929.
Érigé comme un espace éducatif : chaque année, des commémorations et des cérémonies scolaires y sont organisées, pour transmettre aux nouvelles générations la mémoire de ces adolescents devenus symboles de résistance.
A travers ces deux lieux sacrés, c’est toute l’histoire moderne de la Corée qui s’offre au regard.


























"Water of life" ou "Source de la Démocratie"










Au sein du Mémorial du 18 Mai à Gwangju, dans la partie souterraine du bâtiment principal du May 18 National Cemetery, se trouve une installation symbolique connue sous le nom de « Water of Life » ou « Source de la Démocratie ». Cette source, que l’on aperçoit sur la photographie, s’écoule le long d’une rigole lumineuse traversant plusieurs sections du musée, offrant un parcours autant esthétique que mémoriel.
Chaque élément de cette installation est chargé de signification. L’eau, limpide et continue, représente la vie et la pureté, tout en rappelant la mémoire des citoyens tombés lors du soulèvement de mai 1980. Les lumières bleue et rouge évoquent la dualité entre tragédie et espoir, ainsi que l’équilibre cosmique du Taegeuk, symbole central du drapeau coréen. Le tracé linéaire de l’eau crée un lien symbolique entre les différentes parties du mémorial, illustrant la continuité de la mémoire historique et de la démocratie dans la société coréenne.
Le Mémorial du 18 Mai a été conçu non seulement pour documenter les événements du soulèvement de Gwangju, mais également pour commémorer la dignité humaine et la résistance pacifique des citoyens. L’eau occupe une place centrale dans cette architecture mémorielle : présente à la fois dans les bassins extérieurs du cimetière et dans cette source intérieure, elle incarne l’idée que la démocratie, nourrie par le sacrifice de vies humaines, demeure vivante et fluide.
Certaines pratiques des visiteurs soulignent cette dimension symbolique. Déposer quelques gouttes dans la vasque principale constitue un geste de respect et de purification, inspiré des rituels traditionnels coréens. Cette coutume commémorative, loin de toute connotation religieuse, reflète la manière dont les individus peuvent participer, par un acte simple, au maintien vivant de la mémoire collective.
Et enfin, les lumières de Gwangju



















